
Photo: Méditation marchée avec la sangha d' Anvers.
Au sujet du réchauffement planétaire, Thay a raconté à Times Magazine l'histoire de ce couple qui a mangé la chair de leur fils – l'histoire est racontée par le Bouddha dans le "Sutra de la chair du fils".
Ce couple, sur leur chemin de recherche d'un asile, devait traverser un désert. Par manque de connaissance géographique, ils tombèrent en panne de nourriture alors qu'ils étaient à mi-chemin au milieu du désert. Ils réalisèrent qu'ils allaient mourir tous les 3 et qu'il n'y avait plus d'espoir d'atteindre le pays à l'autre extrémité du désert. Finalement, ils décidèrent de tuer leur petit garçon. Chaque jour ils mangeaient un petit morceau de sa chair afin d'avoir assez de force pour avancer et ils portaient le reste de la chair de leur fils sur leurs épaules de telle sorte qu'il pouvait sécher au soleil. Chaque fois, quand ils finissaient de manger un morceau de la chair de leur fils, le couple se regardait l'un l'autre et disait « Où est notre fils bien aimé ? » Après avoir raconté cette tragique histoire, le Bouddha regarda les moines et dit « Pensez-vous que ce couple était heureux de manger la chair de leur fils ? » « Non, Vénérable, le couple souffrait quand ils devaient manger la chair de leur fils » répondirent les moines. Le Bouddha a enseigné « Chers amis, quand nous mangeons, nous devons pratiquer de telle sorte qua nous pouvons faire naître la compassion dans nos c½urs. Nous devons manger en pleine conscience. Sinon, nous pouvons manger la chair de nos propres enfants.»
UNESCO a rapporté que, chaque jour, environ 40.000 enfants meurent à cause de la faim ou du manque de nourriture. Pendant ce temps, le maïs et le blé sont largement cultivés pour nourrir du bétail (vaches, cochons, poulets, etc.) ou pour produire de l'alcool.
Plus de 80% du maïs et plus de 95% des céréales aux USA servent à nourrir le bétail. Le bétail mondial consomme à lui tout seul une quantité de nourriture équivalente aux besoins en calories de 8.7 milliards de personnes, soit plus que la totalité de la population de la terre.
En mangeant et en buvant en pleine conscience, nous réaliserons que nous sommes en train de manger la chair de nos propres enfants.
En 2005, la FAO (Organisation des Nations Unies pour la nourriture et l'agriculture) a commencé une étude approfondie des divers impacts du cheptel mondial sur l'environnement. Son rapport, intitulé « Ombre sur l'élevage : conclusions et options environnementales » fut publié le 29 novembre 2006. Henning Steinfield, chef de la branche information et politique de l'élevage de la FAO et membre senior du rapport, dans son résumé exécutif, affirme que « Le secteur de l'élevage ressort comme un des 2 ou 3 plus importants acteurs significatifs contribuant aux problèmes les plus sérieux de l'environnement. Les données de ce rapport suggèrent que ce doit être une politique prioritaire que de traiter les problèmes de dégradation du sol, du changement climatique, de la pollution de l'air et de l'eau, de la pénurie de l'eau et de la perte de la biodiversité. La contribution du bétail aux problèmes de l'environnement se situe à une échelle massive et sa contribution potentielle à leur solution a également une dimension importante. L'impact en est tellement significatif qu'il est nécessaire de s'en occuper d'urgence » (page XX) 1
Dégradation de la terre : actuellement, l'élevage occupe 70% de toute la terre agricole et 30% de la terre cultivable à la surface de la planète. Les forêts sont abattues pour créer de nouveaux pâturages et c'est une cause principale de la déforestation. Par exemple, en Amérique Latine, quelque 70% des forêts primaires en Amazonie ont été transformées en pâturages (page XXI)1. A partir de ces chiffres, nous pouvons voir que l'élevage a détruit des centaines de millions d'acres (N.D.T : un acre = 0.4 hectare) de forêts dans le monde entier au profit de récoltes et pour créer des pâturages pour les animaux de ferme. De plus, quand les forêts sont détruites, des quantités énormes de CO² stockées dans les arbres sont relâchées dans l'athmosphère.
Changement du climat : le secteur de l'élevage a un impact majeur sur l'athmosphère et le climat. Il est responsable pour « 18% des émissions de gaz à effet de serre mesurées en équivalent de C0², supérieur à la part des transports. » Ceci signifie que l'élevage des animaux pour la nourriture génère plus de gaz à effet de serre que toutes les voitures et camions dans le monde. Le secteur de l'élevage compte pour 9% des émissions de C0² d'origine humaine. Il émet aussi 37% de protoxyde d'azote , en grosse partie due à la fermentation intestinale des ruminants. C'est un montant énorme parce que chaque livre (NDT une livre = 453 gr) piège 23 fois plus que le CO² la chaleur dans notre atmosphère (23 fois le potentiel de réchauffement [GWP] du CO²). La viande, les ½ufs et l'industrie laitière sont également responsables de l'émission de 65% de protoxyde d'azote, la plupart à partir du fumier. Le protoxyde d'azote est environ 300 fois plus actif que le CO² en matière de réchauffement planétaire (296 fois le GXP du C0²). Il est aussi responsable d'environ 2/3 (64% des émissions d'ammoniaque qui contribuent largement aux pluies acides et à l'acidification de l'écosystème (page XXI)
Raréfaction et pollution de l'eau : plus de la moitié de toute l'eau consommée aux U.S.A. est utilisée pour l'élevage des animaux. Il exige 2.500 gallons (NDT un gallon US = 3,78 l.) d'eau pour produire une livre de viande. En même temps, il faut seulement 25 gallons d'eau pour produire une livre de céréale. Le bétail aux U.S.A. produit une énorme quantité d'excréments d'origine animale, 130 fois plus que les excréments d'origine humaine ; à chaque seconde, les animaux relâchent 97.000 livres de matières fécales. « La plupart de l'eau utilisée pour la boisson et le service de l'élevage retourne à l'environnement sous la forme de fumier et eaux usées. Les excréments du bétail contiennent une quantité énorme de nutriments [nitrates, phosphore, potassium], résidus de produits chimiques, métaux lourds et pathogènes » (page 136)1. Ces déchets pénètrent dans les torrents et les rivières, polluant les sources et causant des épidémies qui affectent toutes les espèces.
Exactement comme le Bouddha nous en a avertis, nous sommes en train de manger la chair de nos enfants et petits-enfants. Nous sommes en train de manger la chair de nos pères et mères. Nous sommes en train de manger notre propre planète. Le sutra de la chair de notre fils a besoin d'être à la disposition de toute l'espèce humaine afin de l'apprendre et de la pratiquer.
La recommandation de l'ONU est claire : “L'impact sur l'environnement par unité de bétail produite doit être divisée par 2, seulement pour éviter d'accroître le niveau des dégâts au-delà du seuil actuel. » (page XX)1 Nous devons réduire d'au moins 50% les produits issus de l'industrie de la viande et nous devons donc consommer 50% moins de viande. L'ONU rapporte également que, même si l'élevage crée moins de pollution, nous devrons encore utiliser une nouvelle technologie pour aider le reste de l'élevage à créer moins de pollution, telle qu'un choix de régimes alimentaires pour les animaux qui puissent réduire leur fermentation intestinale et, en conséquence, les émissions de méthane, etc. Une action urgente doit être entreprise aux niveaux collectifs et individuels. En qualité de famille spirituelle et humaine, nous pouvons aider à lutter contre le réchauffement global avec la pratique de la pleine conscience. Devenir végétarien peut être le moyen le plus efficace de lutter contre le réchauffement planétaire.
Les pratiquants bouddhistes ont adopté le régime végétarien depuis plus de 2000 ans. Nous sommes végétariens avec l'intention de nourrir notre compassions envers les animaux. Maintenant nous savons aussi que nous mangeons végétarien afin de protéger la terre en empêchant l'effet de serre de causer un dommage sérieux et irréversible. Dans un futur proche, quand l'effet de serre deviendra sévère, toutes les espèces souffriront. Des millions de gens mourront et les niveaux des mers s'élèveront et inonderont cités et terres. Beaucoup de maladies menaçantes pour la vie en résulteront et toutes les espèces en subiront les conséquences.
A la fois, les pratiquants monastiques et laïcs pratiquent le régime végétarien.. Bien que le nombre de pratiquants laïcs qui sont 100% végétariens n'est pas aussi important que les pratiquants monastiques, ils pratiquent en mangeant des repas végétariens de 4 à 10 jours par mois. Thay croit que ce n'est pas si difficile d'arrêter de manger de la viande quand nous savons que nous sommes en train de sauver la planète en agissant ainsi. Les communautés de laïcs doivent être courageuses et prendre l'engagement d'être végétarien, au moins 15 jours par mois. Si nous agissons ainsi, nous sentirons une sensation de bien-être. Nous aurons la paix, la joie et le bonheur dès le moment où nous aurons fait ce v½u et pris cet engagement. Au cours des retraites organisées aux U.S.A. cette année, beaucoup de pratiquants Américains bouddhistes ont pris cet engagement d'arrêter de manger de la viande ou d'en manger 50% moins. Ceci est le résultat de leur éveil après qu'ils aient écouté les enseignements du Dharma sur l'effet de serre. Prenons soin de notre mère la Terre. Prenons soin de toutes les espèces, y compris nos enfants et petits-enfants . Nous devons seulement être végétariens et nous pouvons déjà sauver la terre. Etre végétarien ici signifie que nous ne consommons pas de produits laitiers ni d'½ufs parce que ce sont des produits de l'industrie de la viande. Si nous arrêtons de consommer, ils arrêteront de produire. Seul un éveil collectif peut créer assez de détermination pour l'action.
En ce mois de décembre 2007, Deer Park aura 100% d'électricité produite par énergie solaire pour les usages du monastère. Tous nos monastères, au Village des Pruniers en Europe ou en Amérique du Nord, pratiquent une journée sans voiture une fois par semaine et des milliers de nos amis pratiquent également avec nous. Nous avons commencé à moins utiliser les voitures et à nous servir de voitures électriques et de « vege-cars » qui fonctionnent à l'huile végétale. Ces voitures peuvent contribuer à réduite de 50% les rejets de CO². En achetant une Toyota Prius, qui fonctionne moitié à l'essence, moitié à l'électricité, nous pouvons empêcher 1 tonne de dioxyde de carbone de pénétrer dans l'atmosphère chaque année. Cependant, selon l'Université de Chicago, « être un végétarien est plus efficace dans la lutte contre l'effet de serre ; un végétarien réduit approximativement de 1,5 tonnes la quantité de dioxyde de carbone d'entrer dans l'athmosphère chaque année par rapport à un mangeur de viande... vous pouvez dépenser plus de 20.000 $ pour l'achat d'une Prius et encore émettre 50% de plus de dioxyde de carbone que si vous aviez abandonné la viande et autre produits d'origine animale » (Lutte contre le réchauffement en devenant végétarien)3 .Voyez-vous cela, ma chère famille spirituelle ? Etre végétarien est déjà suffisant pour sauver le monde. Qui parmi nous n'a pas expérimenté le goût délicieux des nourritures végétariennes ? C'est seulement quand nous sommes habitués à manger de la viande que nous ne pouvons voir cette vérité.
Ce soir au début de la retraite, chacun sera informé que nous n'utiliserons aucun produit laitier, ni oeufs pendant toute la retraite. A partir de maintenant, toutes nos retraites et, naturellement, tous nos centres de pratique en Asie, Europe et Amérique du Nord seront conduits de cette manière. Thay croit que les pratiquants laïcs comprendront et nous soutiendront de tout c½ur. Notre pratique actuelle est d'aider chacun à devenir conscient du danger du réchauffement planétaire afin de sauver la Terre Mère et toutes les espèces. Nous savons que, s'il n'y a pas un éveil collectif, alors la terre et toutes les espèces n'auront aucune chance d'être sauvées. Notre vie quotidienne doit montrer que nous sommes éveillés.
Le 2 octobre 2007, à l'Université de San Diego, Thay a fait un enseignement sur de l'inquiétude, la peur et le désespoir en relation avec le danger du réchauffement planétaire. Le nombre de personnes qui tombent malades par suite de soucis, peur et désespoir augmentent chaque jour. Thay réalise que, si les humains continuent de vivre dans l'ambition, la haine et l'ignorance, alors la terre et toutes les espèces n'auront aucune chance d'échapper à ce danger. Cet état de fait et cette peur peuvent submerger et paralyser beaucoup de personnes et alors il y aura ceux d'entre nous qui mourront de maladie mentale avant que le danger du réchauffement planétaire existe pleinement. Dans l'enseignement du Dharma, Thay a offert la pratique enseignée par le Bouddha : connaître et accepter la vérité et ne pas la fuir.
Le Bouddha nous a enseignés de pratiquer en regardant directement dans les graines de peur qui sont en nous, au lieu d'essayer de les refouler ou de les fuir. C'est la pratique des 5 rappels. 1) Je n'échapperai pas à la vieillesse 2) Je n'échapperai pas à la maladie 3) Je n'échapperai pas à la mort 4) Un jour je perdrai les choses et les gens que j'aime aujourd'hui. 5) Quand mon corps se désintégrera, je ne pourrai rien emmener avec moi sauf mes actions physiques, de paroles et d'esprit – elles sont le seul héritage que je peux emporter. Quand nous pouvons pratiquer en acceptant ces vérités de cette manière, nous aurons la paix et nous aurons la capacité de vivre sainement et de façon compassionnelle. – en ne causant aucune souffrance à nous-mêmes et aux autres. Quand les gens avec le cancer ou le SIDA apprennent leur diagnostic pour la 1ére fois et qu'on leur dit qu'ils n'ont plus que 3 mois ou 6 mois à vivre, au début, ils réagissent souvent avec colère, révolte et désespoir. Ils ne peuvent l'accepter. Cependant, une fois qu'ils sont capables d'accepter la vérité, ils commencent par être en paix. Quand ils auront trouvé la paix, ils auront l'occasion de pratiquer en vivant « profondément » chaque instant de leurs vies quotidiennes. Le résultat est qu'ils auront plus de chance de vivre plus longtemps, même 15 ans de plus. Nous avons l'exemple de s½ur Dam Nguyen d'Hanoi. Une année, elle est venue au Village des Pruniers avec l'intention de vivre avec Thay et la Sangha pendant quelques mois, ensuite elle retournera à Hanoi pour mourir. Le docteur lui avait dit qu'elle n'avait plus que 3 à 4 mois à vivre. Quand elle arriva au Village, les s½urs lui suggérèrent d'aller voir un docteur mais elle refusa. Elle ne sentait pas le besoin de voir un docteur. Elle acceptait sa mort et elle vécut avec tout son c½ur chaque instant qu'elle passa avec la Sangha durant 3 mois. Quand son visa arriva à expiration, elle dit adieu à la Sangha. Une s½ur plus âgée lui suggéra de voir un docteur « juste pour voir » ce qui se passait avec son cancer. S½ur Dam Nguyen accepta afin de faire plaisir à la s½ur. Le docteur l'informa que les métastases dans son corps s'étaient réduits à une seule localisation et qu'elle allait fort bien. Notre s½ur rentra à Hanoi avec une grande joie. Cela fait 14 ans depuis qu'elle a quitté le Village des Pruniers et elle vit toujours.
Le Bouddha nous a enseigné que tous les phénomènes sont impermanents, qu'il y a la naissance, puis la mort. Notre civilisation est aussi comme cela ; Dans l'histoire de la terre, beaucoup de civilisations sont mortes. Si notre civilisation moderne est détruite, elle suivra également la loi de l'impermanence. Si notre espèce humaine continue de vivre dans l'ignorance et dans un puits sans fond d'avidité comme cela est le cas actuellement, alors la destruction de cette civilisation n'est pas loin. Nous devons accepter cette vérité, juste comme nous acceptons notre propre mort. Une fois que nous l'aurons acceptée, nous ne réagirons plus avec colère, révolte et désespoir. Nous aurons la paix. Une fois que nous aurons la paix, nous saurons comment vivre de sorte que la terre ait un avenir ; de telle sorte que nous pouvons vivre ensemble dans un esprit de fraternité et utiliser la technologie disponible pour sauver notre planète bien aimée. Sinon, nous mourrons d'angoisse mentale avant que notre civilisation se termine réellement.
Notre mère, la Terre, la planète verte a souffert des méthodes violentes et ignorantes de consommation de ses enfants. Nous avons détruit notre Mère Terre comme une bactérie ou un virus détruit le corps humain parce que la Mère Terre est aussi un corps. Naturellement, il y a des bactéries qui sont bénéfiques pour le corps humain. Des milliards de ces bactéries sont présentes en nous, spécialement dans notre système digestif (connues comme flore intestinale). Elles protègent le corps et aident les enzymes à se régénérer comme cela nous est nécessaire. De façon similaire, l'espèce humaine peut aussi être un organisme vivant avec la capacité de protéger le corps de la Mère Terre, si l'espèce humaine s'éveille et sait vivre de façon responsable, avec compassion et bonté aimante. Le bouddhisme est venu à la vie de telle sorte que nous apprenions à vivre de façon responsable, avec compassion et bonté aimante. Nous devons voir que tout inter-est avec notre Mère Terre, que nous vivons et mourons avec elle.
La Mère Terre est passée par des renaissances de nombreuses fois. Après le grand déluge causée par le réchauffement global, peut-être une petite portion de l'humanité survivra. La terre aura besoin de plus d'un million d'années pour récupérer et se couvrir totalement à nouveau d'un magnifique manteau vert. Pour l'espèce humaine, un million d'années est une longue période de temps mais, pour la terre et le temps géologique, un million d'années n'est rien ; c'est seulement une courte période de temps. De façon ultime, toute naissance et toute mort ne sont que des phénomènes superficiels. Non-naissance et non-mort sont la vraie nature de toutes choses. C'est l'enseignement de la Voie du Milieu du Bouddhisme. Cette lettre est déjà longue, aussi Thay ne désire pas s'étendre davantage sur cet enseignement ; La retraite a commencé et, dans une autre demie-heure, Thay rejoindra la sangha. Thay souhaite à tous paix et profonde pratique.
Avec amour et confiance.
Thầy

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